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Banque centrale   19.06.2025 13:01:09

La BNS ramène son taux directeur à zéro et appréhende la suite

Zurich (awp) - La Banque nationale suisse (BNS) a abaissé jeudi pour la sixième fois consécutive son taux directeur, le ramenant à zéro pour faire face à une inflation qui flanche. L'éventuelle prochaine étape, le passage à des taux négatifs, n'est pas exclu mais appréhendé en raison des conséquences négatives découlant d'une telle décision.

"Zéro n'est pas négatif, même si certains taux sur les marchés peuvent l'être", a insisté Martin Schlegel, le patron de l'institut d'émission helvétique, en conférence de presse à Zurich.

La banque centrale helvétique a abaissé de 25 points de base son taux rémunérant les avoirs à vue détenus par les banques pour le ramener à 0,00% à l'issue de son examen trimestriel de la situation économique et monétaire du pays. Ce scénario était largement anticipé par les économistes interrogés par l'agence AWP.

L'abaissement du taux directeur vise à redynamiser quelque peu l'essoufflement de la pression inflationniste, passée en mai à -0,1%. La BNS vise une inflation entre 0,0% et 2,0% qu'elle assimile à la stabilité des prix. En réduisant son taux directeur, la banque centrale rend moins attrayante les placements en francs, espérant ainsi relancer la consommation et donc les prix.

Depuis sa dernière réunion en mars, l'inflation a poursuivi son recul, a constaté l'institut d'émission. De 0,3% en février, elle s'est inscrite à -0,1% en mai, reflet des baisses de prix pour les produits pétroliers et dans le secteur du tourisme.

Les banquiers centraux ont remanié leur prévision d'inflation conditionnelle pour l'année en cours à 0,2%, contre 0,4% au dernier pointage. Les estimations à plus long terme restent à 0,5% pour 2026 et 0,7% en 2027.

Pour le responsable de la Banque nationale suisse, les assouplissements monétaires effectués ces 18 derniers mois "ont permis de contrer précocement le recul de l'inflation". Il n'exclut d'ailleurs pas de passer plus tard aux taux négatifs, une mesure cependant appréhendée.

Passer le taux directeur de la BNS en territoire négatif ne serait pas une décision "prise à la légère", a souligné M. Schlegel, ajoutant être "conscient que les taux négatifs provoqueraient des difficultés pour de nombreux acteurs" économiques.

Parmi les effets secondaires provoqués par les taux négatifs figurent potentiellement une hausse des prix immobiliers. Une telle mesure affecterait aussi la rentabilité des banques, qui est "leur première ligne de défense" en cas de difficulté, a poursuivi Martin Schlegel.

___ Pas d'avantage indus pour les entreprises suisses

Seconde corde à son arc de la politique monétaire, la BNS reste disposée à intervenir au besoin sur le marché des devises pour contrôler l'évolution des prix dans le pays, a martelé son président, alors que la Confédération a été placée sous la surveillance de Washington qui la soupçonne de "manipuler" sa devise.

"C'est la BNS qui fait la politique monétaire de la Suisse et nous devons nous assurer que celle-ci soit appropriée pour la Suisse", a-t-il insisté. M. Schlegel a rappelé que la BNS "n'a pas un objectif de cours de changes". "Lorsque nous sommes intervenus dans le passé sur le marché des changes ce n'était pas pour obtenir un avantage indu pour les sociétés helvétiques", a-t-il souligné.

Déjà qualifiée en 2020 de manipulateur de devises par les Etats-Unis, Berne se trouve à nouveau dans le collimateur du Département américain du Trésor qui l'a placé sur une liste de pays à surveiller. Cela rend toute intervention sur les changes, afin de faire relâcher la pression sur le franc, risquée et pourrait provoquer le courroux de Washington qui mène actuellement des négociations commerciales avec de nombreux pays, dont la Suisse.

Certains experts prévoient déjà que la BNS sera obligée prochainement à activer la mesure des taux négatifs. "Martin Schlegel a laissé entendre que des taux encore plus négatifs ne pouvaient être exclus si la dynamique désinflationniste persistait. Ce sera le cas. Les marchés anticipent désormais un taux directeur à -0,25% d'ici la fin de l'année", prévoit Arthur Jurus d'Oddo BHF Suisse.

Pour Reto Cueni, économiste en chef de la banque Syz, l'approche prudente de la BNS démontre au contraire qu'elle passera seulement son taux directeur "sous zéro lorsque les perspectives d'inflation se seront considérablement dégradées". Le spécialiste s'attend à ce que ce taux reste à 0%. Compte tenu des remous géopolitiques, notamment avec les affrontements Moyen-Orient et la guerre commerciale, l'inflation pourrait même repartir à la hausse.


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